« Théodor Wade » et les premières vagues de « sionisme noir »

20 octobre 2010

« Théodor Wade » et les premières vagues de « sionisme noir »

Chronique : « Théodor Wade » et les premières vagues de  « sionisme noir »

Par Ousmane Gueye

Il ya longtemps que les Haïtiens sont entrés dans l’histoire. Et de quelle manière ! Ce n’est pas à Napoléon Bonaparte de prendre le contre-pied de cette allégation. Il a pris toute la mesure de leur détermination à l’affranchissement lorsqu’il menaçait de rétablir l’esclavage sur l’Ile. Les troupes françaises tombèrent les quatre fers en l’air et Haïti proclama alors son indépendance le 1er Janvier 1804.

Qu’ils ne soient surtout pas tyrannisés par le souci de se voir arracher la vedette. Les Haïtiens ont acquis leur indépendance à la pointe de l’épée. Hélas, partagé entre le marteau que constitue l’onde de choc de ses soubresauts politiques et l’enclume qu’est sa position géographique, le pays survit quand même aux turpitudes du temps.

La première république noire doit restée un trophée que nous brandirons pour toujours. Trophée de notre victoire pour la dignité, trophée de notre combat acharné contre les dominations de toutes sortes : économique, culturelle, mais surtout idéologique.

Cette gloire noire aux confins du monde habite en nous. Des Haïtiens, je n’ai connus que de magnifiques gens qui ont eu, quand l’occasion s’est présentée, à servir la cause du Sénégal. Lucien Lamotte, ex-enseignant de diction au CESTI, qui s’est arraché récemment à notre affection, en est une éloquente illustration. Même séparés de leurs aïeux lointains, de la très lointaine Afrique, leurs moindres soucis doivent faire palpiter nos cœurs et abréger notre sommeil. Au nom de la voix du sang qui coule en nous tous !

Ainsi, saluons-nous le très prévenant geste du Président Abdoulaye Wade ayant consisté à offrir à cent soixante trois Haïtiens une bourse d’études chez nous pour une durée de trois ans. Devrions-nous pour autant y voir un Théodor Herzl sénégalais et un théoricien de « sionisme noir » avec ce voyage des Haïtiens vers leur lointaine « Afrique promise » ? Mon sixième sens ne suggère pas la négative.

J’émets l’idée de bien les recevoir en organisant des journées d’intégration, de parrainage avec leurs camarades étudiants sénégalais, d’aller quelques fois avec eux en weekend à la maison. J’ai la faiblesse de penser qu’il est tout sauf de saison de se lamenter en arguant de nos « mauvaises conditions sociales » (je pense surtout aux étudiants de l’UCAD) et en pointant du doigt le « confort des Haïtiens ». C’est indécent de poser le débat actuellement car nous serons mal vus. Nous ne serons considérés que comme des jaloux tout simplement. Néanmoins, cela ne veut pas dire que j’absous nos autorités. Elles sont très loin d’être imparfaites chers lecteurs.

La venue des vingt cinq haïtiens (dix sept garçons et huit filles) chez nous occulte l’autre actualité du campus de Sanar. Nous nous félicitons du nouvel examen, dit de « remplacement »pour les étudiants de l’Ufr SAT qui pourront espérer poursuivre leur cursus universitaire avec toute la quiétude requise.

Cette nouvelle année universitaire, je veux l’envisager dans toutes ses facettes comme un moment de réconciliation : réconciliation avec nous mêmes.

Au Sénégal, particulièrement, quand la perversion de nos mœurs apparaît au grand jour, on s’empresse de l’expliquer : « jamanoo soppeeku ». Nous Sénégalais entretenons un rapport injuste avec le temps. En atteste fort éloquemment cette boutade  « heure Sénégal ».Hélas, ceux qui devaient passer pour des références sont les plus fautifs dans tout ça. C’est dommage que nos chaines de Télévision et nos stations de Radio ne débutent presque jamais leurs programmes à la bonne heure. La gestion du temps a forcément de fortes répercussions sur notre économie. Ce n’est pas une information que je vous apprends. Trop de manipulations de l’opinion, trop de faux débats à longueur de journée, trop de règlements de comptes et de mécomptes sur la bande FM le temps d’un « Wax sa xalaat ».

Ce n’est pas aujourd’hui que nous avons fait la connaissance de ce postulat sociologique devenu presque un article de foi, même s’il résiste difficilement à mon analyse : « Le tout explique la partie ». Un enseignant nous confiait récemment que c’est la société sénégalaise qui influe sur le comportement de nos camarades étudiants. Eux qui devaient prendre des hauteurs dignes d’intellectuels pur sucre et sortir les masses du gouffre obscurantiste dans lequel s’enlisent encore et hélas bien  de pauvres gens.

Les étudiants, notamment de Sanar, sont une partie de ce « tout social ». Et rien ne prédit qu’ils ne puissent s’offrir sur la scène nationale et internationale comme des modèles chez qui il faut absolument prendre copie. Trop de pollution sonore dans le campus. Ça fait bourdonner les oreilles de tout le monde et ça nous abasourdit. Les cigarettes dans les lieux publics de l’Université Gaston Berger de Saint-Louis : inadmissible.

Rien n’interdit que nous puissions changer nos attitudes et en faire des comportements frappés du sceau du bon sens et de la raison. Car si le « tout explique la partie », c’est bien la somme des parties qui forme le tout. Si l’on s’en tenait à cette explication, comment expliquer les révolutions dans les sociétés, les changements d’attitudes ?

Ce serait suicidaire de tomber dans ce piège fataliste. Ma conviction, je n’entends pas l’insinuer ; je vous la livre : nous étudiants pouvons changer notre société en en faisant un modèle sachant que si nous voulons que ce projet de société tienne debout, commençons par en donner l’exemple.

J’espère que cette année universitaire sera plus enviable que celle de l’année dernière. Nous devons être les garants de la bonne marche de notre campus car qu’il y ait avancée ou reculade dans nos résultats, c’est d’abord nous étudiants que ça interpelle.

Je dois en dernière instance lever ce qui me semble jusque là un équivoque chez la plupart d’entre vous: cette chronique n’est ni un résumé, ni un rappel de l’actualité. On y traite juste de thèmes d’actualité parfois sous des airs plus ironiques, plus drôles, plus enjoués.

Je le dis en ayant à l’esprit, les critiques peu amènes qui m’ont été adressées avec la chronique « Le malheur des résidants du village M ». C’était juste sous des tournures de facétieux que je l’ai rédigée. Dieu sait que j’étais très loin d’être sérieux.

Je vous souhaite une merveilleuse année universitaire 2010-2011.


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Commentaires

Boukari Ouédraogo
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Espérons que ces jeunes haitiens pourront bien s'adapter au contexte africian bien que nos cultures ne soient pas si différentes.

Ousmane Gueye
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Salut Ouédraogo
Merci pour l'attention que vous avez porté à mon article.Je vous asssure que c'est avec beaucoup d'émotion que je l'ai rédigé.Toutefois,sachez que mon raisonnement se veut etre très sensé.Ce n'est pas que j'étais ému que je me suis laissé grimper aux rideaux.Oui je le pense:je pense qu'ils peuvent bien et tres vite meme s'intégrer chez nous en Afrique, au Sud du Sahara.
Je ne dis pas qu'il yait pas de différence entre nous,mais je sais que la voie du sang va triompher.Je n'espere pas de percée raciste aussi car eux, comme nous, se diront :de toute façon,on est les mêmes.
Merci !!!