Vous-vous rendez compte Président ?

22 juin 2011

Vous-vous rendez compte Président ?

Dieu seul pourra nous dire comment finira t- on avec ce Président occupé à ses propres soins qu’à satisfaire la demande sociale. Nous sommes tous des déçus de son installation à la tête de ce pays. Je me rappelle encore l’effusion  avec laquelle la jeunesse l’avait plébiscité pour qu’il vienne soulager nos malheurs et nous faire regretter le socialisme de Senghor et de Diouf. Ce soir-là, l’oreille collée à leurs transistors, des milliers de fils dignes de ce pays avaient fêté, le cœur battant d’euphorie, l’avènement du « dernier homme ».

Hélas, presque douze ans après, force est de savoir que nous sommes toujours nostalgiques de la présidence de la girafe de l’OIF. Au moins, sous le magistère de cette dernière, nous étions sûrs que la justice gardait toujours ses lettres de noblesse dans ce pays. Nous étions certains que ces émules de criminels pouvaient être trainés devant la barre. Nous pouvions tous nous regarder devant un miroir et être fiers de l’exemplarité de notre Nation, cette patrie que nous aimons tant et que nous ne sommes pas encore, sinon jamais, prêts à abandonner aux mains des pillards, cette bande de vandales qui semblent n’obéir à aucune loi, sinon à celle du je-m’en-foutisme d’Etat.

Chaque fois que l’Hymne National résonne en nous, c’est notre fibre patriotique adossée à notre inébranlable foi en sa profonde signification, qui vibre du tréfonds de nous. Nonobstant notre luxuriant horizon culturel, il y a un sentiment transcendant qui massacre les singularités pour s’imposer en maitre-absolu de la diversité : c’est notre conviction que nous appartenons tous à ce SENEGAL. Il ne fut pas un jour où nous eûmes renié, voire abjuré ce sincère attachement à nos valeurs ancestrales qui peuvent se traduire approximativement par vergogne, détermination, courage, foi, sincérité et surtout respect de la parole donnée. Nous avions cru que l’accès équitable aux richesses et l’égalité de tous les citoyens de ce pays devant la justice étaient des principes que vous chérissiez tant ; mais seulement, voilà que vous nous donnez l’impression de les fouler cruellement aux pieds.

Vous nous avez prouvé que la famille passe avant l’Etat, que Karim Meissa Wade est autorisé à faire tout ce que lui dicte sa raison propre au mépris de la raison collective. Vous l’avez observé finir son sommet islamique sans exiger de lui le moindre bilan, du moins, pas à notre connaissance.

Vous l’avez installé à la tête d’un super-ministère, vous l’avez équipé de tous les moyens. Il trône maintenant à la tribune de là où il ne serait jamais convié si vous n’avez pas été son Père.

Des enfants de ce pays meurent dans des prisons, dans les rues, au cours de manifestations pour vous faire part de leur ras-le-bol, pas assez de lumière, histoire de nous édifier, un autre ras-le-bol ! Les responsables de ces actes odieux se fondent dans la nature. Les médias en parlent comme pour nous divertir, et c’en est tout. Ces criminels, au lieu d’être conspués, sont protégés comme des princes. Les populations victimes attendent avec un délire imprécatoire, elles ne sont jamais suivies, si elles ne reçoivent pas une mauvaise punition.

Vous décidez, à vous seul, de ce qui doit faire la pluie et le beau temps. Vous faites et défaites la Constitution, ce texte naguère sacré, maintenant truffé d’enjeux dangereux. J’imagine la promptitude de ces gens qui vont s’empresser de me rétorquer que la Constitution est faite pour nous aider à gouverner, et que, si elle nous retarde, alors il vaut mieux la revoir. Ils ont raison. Mais à la condition que ce vœu de modification soit exprimé par le peuple ou guidé par des intérêts qui l’arrangent. Tel ne me semble pas le cas Monsieur le Président ! Vous jouez et vous jouez des textes juridiques comme d’un costume qui vous conviendrait mal. Je me demande à quoi sert décidément cette précaire Constitution ?

Il en est de même pour votre statue de la renaissance africaine. Vous l’avez élevée contre vents religieux et marées moralistes. On pouvait penser que c’était une farce. On s’est rendu compte que vous y teniez le jour où vous avez martelé devant un parterre de Chefs d’Etat  que « le temps du décollage est arrivé pour l’Afrique. Femmes d’Afrique, qui voulaient que vos enfants s’épanouissent, vous jeunes d’Afrique et cadres d’Afrique, levez-vous et prenez-vous la main par dessus les frontières artificielles pour grossir les rangs des combattants du panafricanisme ».Vous nous dites que vous êtes un partisan du panafricanisme, un adepte de la démocratie, un défenseur de la bonne-gouvernance, un éclairé de la transparence, expliquez Président, car franchement je ne vous suis pas.

En parcourant les diverses étapes qui font la marque de votre règne, je n’entrevois aucune lumière très cher Président. Sinon, une toute moindre, blottie dans les ténèbres de votre bilan que nous savons catastrophique.

Vous nous proposez une loi. Vous concevez que nous sommes le peuple et vous, le souverain. Vous nous demandez donc en tant que souverain, d’apprécier souverainement cette proposition. Mais en jetant le regard sur votre majorité mécanique qui vous obéit au doigt et à l’œil, votre projet n’est pas d’abord un projet, il est acquis d’avance. Ensuite, c’est parce que réalisé d’avance qu’il n’est plus une proposition, mais une magistrale imposition. Sans chercher aucunement à blasphémer, vous usurpez l’évident pouvoir de Dieu. Lui qui décrète et immédiatement, ça prend forme et fond.

Sans présumer de ce qui peut se cacher derrière cette loi, je soutiens qu’elle est dangereuse par cela même qu’elle n’est pas soumise à l’approbation populaire. Car, de grâce, ne nous dites pas que l’Assemblée Nationale, c’est le peuple sénégalais. L’Assemblée, votre Assemblée, c’est là où sont assemblés les gens du PDS, ceux qui vous diront toujours « oui Monsieur le Président ». Soyez certain, Monsieur le Président, de pouvoir les compter comme vos alliés par nature.

Des intellectuels sont capables de défendre toute cette déraison. Ils n’en ont jamais honte. Demain, ils changeront de partis et abjureront tous les mots d’ordre dont ils ont été les fervents défenseurs.  Vogue la galère !

Tout bien considéré, Monsieur le Président, ce ne sont pas sur ces gens là que vous pouvez compter. Malgré l’évidente clarté des choses, je veux croire en désespoir de cause en votre sens de la mesure, de la justice et de la responsabilité. Vous pouvez arrêter cette mascarade avant que le pire ne nous déborde. Vous pouvez arrêter vos hommes qui ne débitent que des platitudes sur les ondes et à l’écran.  A l’heure où nous sommes, personne ne saurait nous dire où est ce que ce cinéma nous mènera. Je suis sûr que les honnêtes fils de la Cote d’Ivoire qui se sont horriblement entretués pour la cause d’un cynique qu’est Laurent Gbagbo, ne s’attendaient pas à cette boucherie. Ils ne s’attendaient pas un jour, à voir le sang humain, naguère si rare et couteux, gicler les rues de la Capitale comme de vulgaires inondations.

Comprenez Monsieur le Président, que fort de toutes ces craintes, je ne pourrai me taire au nom d’un détachement objectiviste, parce que je sais ce que l’entêtement d’un Chef d’Etat peut coûter à ses concitoyens.

Vous avez été par le passé un homme de bonne composition, je veux croire encore que vous le demeurez. Je vous supplie d’en référer à votre sens de la connaissance de l’Histoire.

Je vous prie d’enrayer ce mécanisme de la violence qui se prépare. Je vous prie de penser à ces milliers de jeunes et surtout, à ces vielles personnes qui ont trainé leur corps jusqu’à l’isoloir pour vous élire. Vous ne saurez pas être aussi insensible, Monsieur le Président !

Étiquettes
Partagez

Commentaires