Ousmane Gueye

Chronique : Le dernier mercredi d’un insoumis ?

Il est fort à parier, après tant d’années passées en votre si fidèle compagnie, qu’annoncer brusquement mon départ du Journal Le Campus serait quelque peu discourtois. Voilà qui a fait longuement danser mes doigts avant de me résoudre, malgré moi, à écrire. Écrire, puiser entre mille idées qui me triturent le cerveau, pour vous dire que je – m’en – vais.

J’en suis d’autant plus embarrassé que voilà déjà quatre ans depuis que j’ai pris gout à nos belles habitudes du mercredi. Je n’en avais jamais voulu rater une parce qu’elles étaient toutes passionnantes. Vos critiques, naturellement aussi, très chers lecteurs.

Pendant toutes ces dernières années, j’ai énormément appris grâce à votre attention qui n’a jamais chuté, du reste, au fil des semaines. Aussi, voudrais-je vous dire toute ma gratitude pour cette expérience unique qui a commencé avec la chronique « Imperturbables ambianceurs !». C’est vrai qu’au début, l’idée d’une réflexion hebdomadaire par un  petit rédacteur  ne trouvait point grâce aux yeux de bon nombre de « confrères ». Ma proposition d’animer cette chronique ne plaisait manifestement que peu en effet. M. Ibrahima DEH, autrefois directeur de publication de votre Journal l’avait, quant à lui, bien reçue. La première chronique l’avait manifestement emballé et l’exercice hebdomadaire ne se sera arrêté qu’à ces moments où vous êtes en train de lire ces terribles lignes.

Ce rendez-vous que j’ai tant aimé avec vous très chers lecteurs n’avait qu’une et une seule visée : décrypter l’actualité hebdomadaire à l’UGB. Parce que je suis convaincu que l’Université est le cadre idéal de la réflexion, toute action allant dans ce sens ne peut faire que l’honorer. Nous revendiquant de ce milieu, nous ne saurions donc accepter pour vrai, à la suite de Descartes, que ce que nous aurons fini d’éprouver, d’interroger pour nous en assurer l’évidence. C’est-à-dire nous assurer qu’un malin génie n’est pas en train de tirer les ficelles et nous masquer la vraie nature des choses. Comprendre l’actualité universitaire, se donner les moyens intellectuels de pouvoir en analysant les faits, en saisir les enjeux, tel a été le défi de cette chronique.

A bien des moments, je n’ai pas eu les mots tendres pour certains acteurs de l’actualité sanarienne, je le reconnais. Non pas parce que je leur en voulais personnellement, mais plutôt parce que j’estimais avoir le droit de dire ce que je pensais (pense) d’eux touchant l’Université qui est un espace appartenant à nous tous. A cela, il faut ajouter le fait que la culture du laisser-aller se concrétise de plus en plus à Sanar. J’ai une fois pointé le phénomène du plagiat chez certains enseignants doublé de leur effronterie à fouler au pied les règles les plus élémentaires de la morale. Mais un tel extrémisme n’est pas l’apanage de ces derniers car de plus en plus des particularismes religieux préoccupants toisent mon attention. Signe des temps peut être, le tapage gagne aussi du terrain à Sanar, comme forme perverse de nivellement par le bas. Ce ravalement à ce stade si pitoyable ne m’agrée guère car j’ai toujours voulu croire que l’esprit critique a encore sa place au sein de cette Université, que la primauté – et non la tyrannie- de la raison y est toujours d’actualité…

Loin de ces récriminations, pour en revenir à ce que je disais, je – m’en – vais. Je n’ai pas demandé l’avis de qui que ce soit par crainte d’être influencé. C’est peut-être égoïste de ma part, mais par ce geste, je voulais juste mieux m’égarer, donner libre cours à mes fantaisies, n’écouter que la douce voix de ma conscience, marcher à pas feutrés mais résolus dans le silence nocturne de mes rêves, me diriger à grandes enjambées vers une destination que vous connaitrez bientôt inchAllah.

Le dernier mercredi de l’éternel insoumis que j’ai toujours été et que je demeurerai ? Non certainement très chers lecteurs ! Parce que je n’ai connu que l’écriture et la presse tout au début de mes jeunes années. Parce que je n’ai jamais voulu faire autre chose qu’écrire et dire ce que je pense, je ne saurais donc y renoncer. Peut-être que le prochain rendez-vous que je vous proposerai ne sera plus le même, mais en tout état de cause, on se retrouvera inchAllah. Voici l’adresse de mon blog Le Gandiol en un CliC, https://ousmanegueye.mondoblog.org et celle de ma page facebook https://www.facebook.com/ousmaane. Et mon adresse électronique ousmaane@yahoo.fr

Une fois de plus, toute ma gratitude. Merci infiniment de votre fidélité

Très bonnes vacances et à très bientôt pour un autre rendez-vous !


Un Directeur d’école qui décroche : Monsieur Ndiaye part…

Après de neuf années passées à Mboumbaye Gandiol, Monsieur Ndiaye tire officiellement sa révérence. Il n’est pas certainement facile de rompre d’avec ceux qu’on a longtemps encadrés et avec qui on a passionnément échangé. C’est pourquoi, il est compréhensible que quelque once de mélancolie vienne alourdir l’atmosphère. Car c’est un Directeur d’école rompu à la tâche d’enseignant et qui a sillonné le Sénégal tout au long de sa jeunesse. Ses années de fougue l’ont mené du Fouta à Saint-Louis, puis de Saint-Louis à Gandiol. C’est lors de la fête de fin d’année de l’école élémentaire de Rickott Gandiol que nous l’avons rencontré à nouveau.

Né le 20 Juin 1952 à Saint-Louis du Sénégal, Aliou Saer Niaye est un natif de Guet Ndar (grand quartier populaire) précisément. Le jeune enfant dont la maman est « illettrée » comme il le dit lui-même, trouva une famille tout de même enseignante. Son grand-père dispense des cours coraniques et ses tantes et oncles des cours à l’école française. Et c’est ainsi qu’il tomba d’emblée dans une grande tradition d’enseignant. Et si on est bourdieusien, inutile alors de se demander pourquoi Monsieur Ndiaye a choisi la transmission du savoir comme métier.

Ndiaye est de la vieille école. Sorti du Centre de Formation Pédagogique de Thiès, il a d’abord servi à Dagana 3. L’enseignement, pour lui, est une « véritable passion ».

Il note toutefois quelques difficultés dans le métier d’enseignant à Gandiol. Il les lie au manque d’infrastructures et selon lui, cela freine terriblement la recherche.

C’est un passionné de l’éducation qui part après avoir consacré toute sa vie durant à l’école. L’école élémentaire de Mboumbaye Gandiol l’a manifestement marqué. Et pour preuve : «  Le village qui m’a le plus marqué, là où j’ai vraiment pleuré, c’était Mboumaye Gandiol. Parce que je ne connaissais pas Mboumbaye. Quand on vient dans un village et qu’on vous accueille à bras le corps… être entre les autorités politiques, les autorités académiques, les autorités administratives, les parents d’élèves, les élèves et les maitres… ».

Monsieur Saer Ndiaye ajoute que plusieurs offres lui sont faites, pour la Mauritanie Dakar, mais il préfère encore rester à Gandiol. Comme quoi entre Gandiol et lui, ce n’est pas encore fini…

Bon vent !

Petite légende: Monsieur Aliou Saer Ndiaye en boubou blanc lors de la fête de fin d’année de l’école élémentaire de Rickott ce dimanche 8 Juillet 2012.


Les Gandiolais et le désoeuvrement: A la rencontre de Harouna GUEYE

Macky Sall a suscité et suscite encore beaucoup d’espoirs pour les Sénégalais. Les jeunes auront sûrement raison de ne plus croire dans les discours des politiques. Parce qu’ils ont un « précédent » d’une terrible résonnance. Maitre Abdoulaye Wade s’était en effet érigé en sauveur de la population juvénile, mais ça ne fut que conte et légende !

Dans notre vadrouille dominicale dans le Gandiol, nous avons fait la rencontre de Harouna GUEYE, un jeune ambitieux qui a installé sa petite « entreprise » à Mouit. Il nous expliquait tout d’abord que l’agriculture ne promet plus. Sur ce blog, nous avons déjà parlé de cette douce mort du domaine qui faisait nourrir beaucoup de Gandiolais.

Harouna GUEYE, la trentaine, a décidé d’ouvrir une petite « entreprise » dans la réparation de matériels électroniques. Avec son modeste ordinateur portable, il vend de la musique et charge des téléphones portables de la part de ces autres Gandiolais qui n’ont pas encore accès à l’électricité. Parce qu’il faut dire que celle-ci est très mal répartie dans la communauté rurale, beaucoup sont encore ceux qui pâtissent de son absence.

Il nous disait beaucoup compter sur le nouveau régime pour avoir enfin, à l’instar de nombre de ses camarades, du travail.


Chronique : De l’étudiant modèle au modèle d’étudiant

Bien des mois après cette chronique, la réalité que je dépeignais à Sanar est toujours là, inoubliable, imperturbable ! Une des raisons qui me pousse à re -publier cette réflexion que j’avais intitulée « De l’étudiant modèle au modèle d’étudiant ».

Par Ousmane GUEYE

De l’étudiant porteur d’espoirs et dont on redoutait les idées parfois subversives, il ne reste que cet esprit contrariant trainant nonchalamment sa carcasse vers les UFR. Adieu les temps où Senghor nourrissait des craintes à leur égard en bâillonnant les apprentis sociologues de Dakar. Une attitude salvatrice qui se voulait d’endiguer la marée de soif de liberté, avec en toile de fonds, les événements de Mai 68. Finie l’époque de la folle course aux savoirs, des débats sur l’actualité, de la curiosité jamais assouvie ! Nous assistons à la triste fin d’une merveilleuse époque et au début d’une autre, d’un tout autre ordre !

Du moins, à la lecture jamais interrompue du quotidien au campus, c’est ce constat qui me saute sous la plume. C’est étonnant que la recherche du savoir ne passionne plus les « enfants de Wade ». Que le campus soit submergé de monde quand il y est question de politique.

Que des salles de conférences et des amphithéâtres soient désertés quand on y traite de connaissances en dehors des cours. Les organisateurs de telles rencontres ne se sont jamais mépris sur la nature des étudiants : il n’y a que l’aspect de « l’ici et maintenant » qui les passionne. C’est pourquoi, en désespoir de cause, ils n’ont pas accusé de temps pour se créer une ruse : sur les affiches, est souvent mis en évidence « il y aura cocktail » pour susciter les affluences.

Plusieurs périphrases se sont bousculées dans ma tête pour qualifier cette rupture dans la longue marche de l’UGB. Je résistai d’abord à celle-ci : la mort de l’étudiant. Ensuite, une autre me tenta : la fin d’un mythe. Et enfin, je décidai ce titre: de l’étudiant modèle au modèle d’étudiant.

Quand je pense à ce qu’était Sanar en 1990, et à ce qu’est devenu Sanar 20 ans après, l’envie de vivre au présent me fuit. Mon esprit s’affaisse à force de constats amers, de regrets et d’incessantes « pérégrinations » entre le passé et le présent. Qui n’aurait pas voulu, par un coup de baguette magique divine, que le temps soit reculé, que le futur soit supprimé, pour que la vie soit éternellement fixée sur cette année 1990 ? Ce serait surement le vœu le plus fou, formulable pourtant par des esprits les plus sains de chez nous. Car on ne peut pas détester le bien en se défendant d’être bien, ni détester le bien et idolâtrer le mal.

Sur les ruines de l’étudiant modèle, se construit un nouveau modèle d’étudiant. Vous n’avez qu’à ouvrir les yeux et tendre les oreilles pour vous rendre à l’évidence. Par quel moyen ? Je ne sais pas, mais surement à l’évidence, vous allez vous rendre chers lecteurs.

Le modèle d’étudiant que le mauvais temps expérimente chez nous est celui qu’aucune question sociale n’interpelle en dehors de l’UGB. Il n’a aucun commentaire ou avis à donner sur la marche du monde. Pire, il n’esquisse aucune idée pour la freiner ou l’obliger à bifurquer de sa trajectoire. C’est ce blasement, cette rare « qualité » dont seul l’étudiant de Sanar est doté, qui s’appelle « excellence ».  Ne t’offusque pas de n’en être point attribué cher lecteur, la nature distribue très injustement ce rarissime don du ciel !

Malheur à nos anciens camarades de l’UGB. Ils s’en sont allés pour ne plus revenir de leur étonnement : nous sommes à l’heure de l’étudiant programmé. C’est celui là dont l’esprit est « amarré » sur ses cours, qui ne s’occupe que de ça, du travail en classe ! C’est celui là qu’on n’arrive plus à identifier aux braves hommes qui veillent devant l’entrée des restos ! Car eux aussi, s’habillent en « costumes-cravates », roulent les « r », martèlent les « bonjour », « bonne journée » et les « bonsoir », Ils vous parlent un Français irréprochable en inclinant leurs lunettes sur la presse du jour. Décidément vous diriez-vous : Comment reconnaît-on l’étudiant de nos jours à Sanar ? Car l’engagement grâce auquel on l’identifiait s’est éclipsé. C’est ce que la transition de « l’étudiant modèle au modèle d’étudiant »  donne. Nous sommes à l’heure de l’étudiant-spectateur.


Chronique : L’Université du risque ?

Par Ousmane GUEYE

Il ne se passe plus de mois sans qu’une panne, si minime soit-elle, vienne enrayer la machine universitaire. Même si elle donne l’impression que tout semble réparé ou tout au moins déparé, c’est une machine secouée par tant de mois de grève qui s’échine ridiculement à vrombir.

Comme vous, probablement, très chers lecteurs, j’ai entendu toutes sortes de propos, des moins quiétistes aux plus alarmistes. Quelques illuminés n’ont eu de cesse de prophétiser la mort de l’année. Au train où vont les choses, difficile de réprimer ce catastrophisme puisque le suspense -en tous les cas pour l’observateur que je suis- demeure entier.

Si j’ai du mal à prendre parti entre le « pour » et le « contre » « année blanche », c’est parce que je me sens pris dans un entre-deux difficile. Je suis en effet partagé entre ces deux avis : décréter une année blanche afin de mieux réfléchir aux problèmes de l’Université plus profonds qu’ils n’en donnent l’impression (j’y reviendrai plus loin), et sauver l’année car ce nouveau régime n’est pas signataire des accords Etat-SAES qui nous ont conduits dans ce semblant d’impasse.

J’avais soutenu cette grève dès ma première chronique de l’année 2012. Ce qui justifiait ce choix, c’était que, dans un pays où la parole donnée devient de plus en plus dévalorisée, il fallait amener l’ancien pouvoir à en tenir la promesse. S’ajoutait à cela, un pillage éhonté des finances du pays à un moment où justement il urgeait d’en rationaliser les dépenses. Je ne sais pour quelle raison cette grève a baissé d’intensité en arguant du fait que du temps devait être donné au nouveau régime. J’estime que s’il fallait adopter cette logique, le SAES aurait dû le faire bien plus tôt.

Si je suis aussi pour l’ « année blanche »,-j’avais promis d’y revenir-, c’est parce que les problèmes en question sont d’une si grande épaisseur qu’il faut y consacrer le maximum d’attention. Je ne fais pas naturellement référence qu’à la plate forme des revendications du SAES, du reste très connue. Je veux parler de ce laisser-aller grandissant du système universitaire, en tous les cas de chez-nous. Dans une réflexion intitulée « Les oscars du plagiat », je m’indignais l’année dernière de cette malhonnêteté de quelques enseignants qui n’hésitent pas à plagier leurs collègues d’ailleurs pour « remplir » leurs cours. Et cela, pendant que d’autres s’absentent comme ils le veulent, se rattrapent aussi de la même manière au mépris d’une concertation attendue avec leurs étudiants. Cette reprise de l’enseignement donne à voir, dans bien des cas, une accélération des cours comme si les étudiants étaient responsables de la grève ou en tous les cas, devaient payer pour l’entêtement de l’Etat.

Il est plus que salutaire d’exiger un contrôle de cet enseignement car après tout les personnes qui le dispensent ne sont aucunement au dessus de la loi, encore moins de la morale. Elles sont payées pour s’acquitter correctement de ce qui cesse d’être, lentement, mais dangereusement, hélas, un sacerdoce.


L’éternel mesquin

Abdoulaye Wade n’a jamais su se donner de la hauteur. Même au plus fort de ses jours « présidentiels », cette mesquinerie caractérisée n’a eu de cesse de l’habiter. Je me suis toujours demandé quel devrait bien être l’ « insociable » pulsion qui lui fait dire des propos à l’emporte-pièce, inopportuns, injurieux, colériques, malveillants, subversifs… qui suspectent un mal-être profond.

Dans l’entre-deux tours de la présidentielle dont nous venons « macabrement » de sortir, je m’étonnais de son éternelle posture d’opposant, même au pouvoir ! Je donnais à voir dans cette réflexion les signes évidents, voire pertinents qu’il avait manifestement maille à partir avec la grandeur que doit avoir un Chef d’Etat. Et pour le dire avec des termes d’un grand communicateur, le papa de Karim Meîssa Wade était plutôt un homme de détails.

Ce qui est préoccupant, sinon bouleversant avec ce sombre vieux, c’est l’illusion d’ascendance sur tous les Sénégalais lui faisant accroire qu’il est notre père éternel, le serviteur, le guide, le berger…Je le revois dans son air impudent martelant à ceux qui voulait l’entendre que toutes ces morts n’étaient que du vent. Il le disait dans une assurance surprenante m’amenant à m’interroger sur sa lucidité.

Ceux qui l’aiment (ou l’aimaient ?) souhaitaient pour lui une sortie honorable en le suppliant de quitter le pouvoir. Ils ne pouvaient concevoir que le « grand homme » du 19 Mars sorte du Palais sous la jubilation retentissante de ses adversaires. Mais Abdoulaye Wade n’a jamais pu l’entendre de cette oreille, embarqué qu’il était (ou a toujours été) dans son triomphalisme condescendant.

S’il ne peut se rasseoir, le Sénégal doit l’y inviter. Ce n’est pas à lui d’absoudre sa famille. Il y a un appareil juridique compétent dans ce domaine qui doit s’y atteler. Puisque pendant près de dix ans, tous ceux qui voulaient la justice dans ce pays en ont été empêchés par les dérives d’un présidentialisme pervers, c’est maintenant à ce pays libéré de le faire. Des milliers de liasses de franc CFA ont disparu scandaleusement, étonnamment et impunément, de dignes fils de ce pays ont subi des barbaries de toutes sortes, quand d’autres ont été envoyés à la mort sans aucune prétention ou intention de justice…

Alors, Monsieur le Président, taisez-vous et, si vous voulez aider votre famille, attelez-vous à préparer un pool d’avocats.


Jour d’embouteillage à THIES

Jamais je ne connus de voyage aussi tourmenté que celui de ce matin en arrivant à l’étape de THIES.  Venant de Mont Rolland, j’avais eu vent d’un camion fou qui avait pris en otage les voyageurs. Je pensais que tout s’était désengorgé pour le meilleur. C’est avec effarement que je suis tombé sur le grand « monstre » qui gisait là sur les rails en entrant dans la ville de THIES.

Auparavant, mon attention avait été frappée par les longues files de voitures qui s’étaient massées à côté du garage de Mont Rolland. Je fus obligé d’ « enfourcher » pour la première fois une moto, un vélomoteur (que sais-je ?) pour me rendre à la gare routière de THIES.

Et comme un malheur n’arrive jamais seul, je tombai, après avoir poussé quelques ouf jubilatoires (parce que pensant que j’avais échappé bel à ce blocage) sur une foule de voitures prises en otage sur la Nationale 1.

Après avoir douloureusement langui là pendant quelques minutes, notre chauffeur dut s’inventer une salvatrice astuce : il prit congé de Allou Kâgne (réputé par ailleurs être un habitat d’un terrible djinn) pour emprunter une route toute poussiéreuse.

Voilà ce qui me créa de violents maux de tête dont je souffre encore au moment de mettre cet article en ligne. Décidément, THIES ne fait pas beau à voir aujourd’hui.

 

 

 

 

 

 


Après la guerre des nerfs, la guerre des mots

Dans une future analyse que j’ai déjà intitulée « Comment le Sénégal a perdu Wade », j’entends montrer par quelle imprudence irrespectueuse, un énorme fossé s’est creusé entre les populations et le Président de la République.  Et cela, étonnamment en l’espace de quelques années !

Mais, je veux bien consacrer mon attention, dans l’immédiat, à décrypter cette mésinterprétation bien recherchée, mais voulue, faite de la conférence de presse de Macky SALL.

Toutefois, vous allez convenir avec moi que la délation intentée contre le leader de l’APR (Alliance Pour la République) est bien antérieure à l’élection présidentielle. Elle a été déclenchée depuis que les sondages ont crédité à l’ancien premier ministre d’Abdoulaye Wade de fortes chances de remporter la grande consultation électorale.

Mais officiellement, c’est Abdoulaye Wade qui a donné les premières pelletées pour enterrer Macky Sall. Puisqu’il n’a pas pu le battre électoralement (du moins, au premier tour), il va tenter de lui porter la dernière estocade en faisant accroire que l’ancien Chef de la magistrature a un parti pris pour les Peuls. Ce n’est rien moins qu’une accusation bien calculée visant à le calomnier et donc, à le dénigrer. Et dans ce sens, cette manipulation de l’opinion n’est pas nouvelle. C’est une pratique bien classique qui remonte depuis la nuit des temps, notamment dans les régimes totalitaires consistant à se servir des médias pour desservir d’honnêtes citoyens.

Macky SALL l’a bien dit : Abdoulaye Wade lui-même demandait à celui qui était son directeur de campagne de s’adresser aux populations peules en Poulaar. Donc, cette accusation est dénuée de tout sérieux : elle est politicienne et hypocrite. Elle ne mérite pas qu’on s’y attarde.

Une autre mésinterprétation tendancieuse à relever est liée à la dernière conférence de presse de Macky Sall. Je n’ai besoin d’aucun reportage à son propos puisque je l’ai écoutée en direct. J’ai entendu quelqu’un mésinterpréter bien volontairement les paroles du conférencier en disant que Macky Sall s’est attaqué au marabouts. C’est absolument faux. Le candidat au deuxième tour à l’élection présidentielle n’a fait que rappeler l’égalité juridique de tous les citoyens devant la loi parce que nous vivons dans un pays démocratique, et encore une fois, non dans un royaume. L’hypocrisie consiste à déconnecter les propos du leader de l’APR de leur contexte, voire de leur texte pour les extrapoler si perfidement. Je précise que Macky n’a pas dit que les marabouts sont de simples citoyens sociologiquement ; ils le sont juridiquement. Cela ne suggère pas qu’il les minimise ou les méprise. Nous ne pouvons pas vivre dans une démocratie ou une République de privilèges : tout a été dit dès lors que le Sénégal a opté pour une République.

Mais c’était déjà suffisant au regard de quelques opportunistes qui ne rêvaient que de cette unique occasion pour se lancer à la détraction. Mais c’est peine perdue puisque les Sénégalais ne sont pas dupes.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Présidentielle 2012 : Qui a dit que les Sénégalais sont dupes ?

Même comparée à celle de l’an 2000, l’élection présidentielle (du moins le premier tour), a manifestement suscité toutes les curiosités. Jamais scrutin n’avait été aussi omniprésent dans les médias internationaux. On pourrait avancer comme principale raison que c’est l’élection qui aura accaparé l’attention de par sa masse massive d’originalité.

De la candidature de Youssou Ndour en effet,  à l’entrée dans le champ politique sénégalais de Diouma Dieng Diakhaté passant par le forcing d’Abdoulaye Wade, toutes les grandes saveurs avaient été au rendez-vous pour « charmer » la presse.

Le fait que le Président sortant soit en passe d’accéder au second tour tient, comme je le disais ce matin, de la plus insondable des énigmes. Je ne comprends pas, après tant de souffrances infligées aux populations sénégalaises, tant de morts « sans auteur », tant de fautes de gestion sans correction, qu’Abdoulaye Wade sorte « indemne ». Le Pape du Sopi serait, selon toute vraisemblance, sauvé d’une cruelle déculottée.

Certains n’hésitent pas à dire qu’il doit ce salut à son privilège de Président de la République avec tous les moyens de l’Etat- expliquent-ils- investis dans la campagne électorale sans qu’il ne lui soit demandé le moindre contrôle. Il faut rappeler à ce propos qu’il suffit de jeter un coup d’œil sur la campagne pour se laisser convaincre par de telles allégations. Et de ce point de vue, l’égalité des chances semble dores-et-déjà rompue de ce seul fait. Passer dans le JT de la RTS tous les jours est déjà une campagne électorale permanente, en plus du contact continu avec les populations.

J’entretiens le secret espoir qu’à l’avenir, une législation sera faite dans le sens d’alléger cette inégalité « par défaut », à moins de la corriger. Et cela, d’autant plus qu’il nous est très difficile de faire la part des choses entre ce qui relève du Chef de parti (d’une partie) de ce qui relève du Chef de l’Etat, c’est-à-dire, chef d’un tout.

Le pourcentage de participation escompté me surprend un peu et l’explication qu’on en donne est loin de me satisfaire : la présence d’Abdoulaye Wade a découragé les électeurs. Il faut par ailleurs noter la grande prophétie contra-réalisatrice qui a bien été au rendez-vous aussi, ai-je retenu dans les considérations générales. Ils étaient nombreux à s’attendre à des scènes de violence lors du déroulement du premier tour. Je n’oublie pas au passage que quelques scènes d’agression ont été signalées notamment chez certains mackystes ainsi que chez Dia de Walfadjiri.

Malheureusement, en Afrique, cette donne est trop présente pour être décriée.

Le fait que l’ancien premier ministre d’Abdoulaye Wade ait engrangé toutes ces voix est un fait normal, j’allais dire bien prévisible. Moustapha Fall a même eu l’humilité de dire sur la RFM que c’est un mérite personnel de Macky Sall et qu’il s’y était consacré depuis bien longtemps. Cela rappelle bien à ceux qui ont toujours eu à le nier, que les Sénégalais sont loin d’être dupes.

En attendant que le ciel politique se dégage pour nous permettre de mieux y voir, la perspective nous annonce des enjeux passionnants. Reviendra dans le débat politique –si bien sûr, il y aura un second tour-, la question de l’unité de l’opposition sénégalaise. Si celle-ci décide de soutenir Macky Sall, je me demande si ce sera à la stricte condition que ce dernier accepte de signer la charte des assises nationales.

Mais, pour une fois, on peut croire que ses camarades opposant pourront surmonter les clivages traditionnels, les querelles intestines au nom de l’enjeu. Ou bien ils s’uniront, ou bien Abdoulaye Wade sera réélu. L’opposition doit choisir.


Le moment Wade

A Abdoulaye Wade, un nombre incalculable d’impairs et de maladresses a été imputé. Je me suis employé depuis bien des jours à les énoncer et à les dénoncer. Mais au fond de moi, je sens que c’est un procès quelque peu acharné ! Parce qu’au vieil opposant au pouvoir, il faut tout de même reconnaître un mérite : celui d’avoir révélé la nature de certains Sénégalais.

Il n’est un secret pour personne que la société étouffe quelque fois les comportements individuels qui, par suite, apparaissent standardisés et indifférenciés. Il s’ensuit un tenace « écran de fumée » qui dissimule la vraie nature de l’acteur social.

Mais, avec l’épisode Wade, tous ces masques ont sauté comme par enchantement et voici que tout est mis au grand jour. Je n’ai eu aucune surprise à entendre le silence bruyant
de certains « marabouts » au plus fort des violences électorales. Et quand quelque préjudice les égratigne ou égratigne leur confrérie, ils sortent de leur torpeur et assiègent nos médias. A les observer, tous ces morts jusqu’ici sans auteur ne sont dignes d’aucune offuscation et dénonciation. Ils n’entendent absolument pas que leur « magnanimité naturelle » à l’endroit du pouvoir s’en trouve ressentie.

Au début des convulsions nées de la validation de la candidature d’Abdoulaye Wade, un Sénégalais a osé demander aux Sénégalais d’arrêter leurs manifestations au motif de ne pas
déranger le maouloud. Cet appel irrespectueux et quelque peu candide fait l’effet, à mon avis, d’une moquerie, sinon d’une indifférence manifeste face aux grandes questions nationales. C’est comme qui dirait que les manifestations qui ont coûté plusieurs vies sont trop puériles pour mériter d’accaparer l’attention citoyenne. Cela veut dire qu’en plus de ne pas s’intéresser- en tous cas manifestement – aux enjeux qui nous intéressent, ils nous intéressent à ne pas nous y intéresser. Et c’est en cela que réside la tragédie.

A ceux qui divinisent et « messianisent » nos religieux, je supplie avec vigueur et détermination de ramener ces derniers à leurs justes proportions d’homme. Entendez des êtres faillibles, donc imparfaits. Descendons les du ciel et faisons d’eux des êtres « tangibles ». C’est à cette seule condition que nous pouvons nous apercevoir de leurs erreurs afin de les rectifier en cas de besoin. Remettre en question cette tranquille certitude, c’est rendre discutables les fameuses consignes de vote communément appelées « le ndinguel ». Il y va de la paix de notre SENEGAL.