Ma « Renaissance africaine » à moi !
Je ne cesse de me demander ce qui expliquerait la propension de certains Chefs d’Etat africains à vouloir faire du bruit autour de leurs réalisations, sinon imprimer leur passage terrestre dans ce monde ?
La polémique sur la scandaleuse statue de la « Renaissance africaine »-du moins, à mon sens- n’a pas encore fini d’enfler que s’installe le « festival mondial des arts nègres ». Je n’ai rien contre cette idée de célébrer nos valeurs, de les proclamer et mieux, de consacrer-mais ce n’est qu’une constatation comme a dit l’autre- l’importance de l’homme noir dans l’histoire et la marche de la planète. Au contraire, je l’appuie, je la salue. Mais si seulement, le contexte économique et social l’autorisait !
Les populations vivent avec étonnement l’inflation des prix, leur volatilité sur le marché donnant toujours sujet à inquiétude. La poche du « gorgorlou » (le débrouillard en Wolof), se troue à mesure que les conditions sociales de notre vie deviennent agressives.
La saga des transhumances bat son rythme au son des campagnes politiques à n’en plus finir sur les candidatures que certains étiquettent de « problématiques », voire d’ »impossibles ». L’arène de la scène nationale donne à voir des gens prompts à tout défendre au mépris des bonnes manières et des vertus républicaines. Où va la masse de personnes cataloguées « analphabètes » si celle qui proclame sa sagesse et son « intellectualisme » se réduit à suivre, plutôt qu’à montrer le chemin, à s’enlaidir dans de faux débats au lieu de se bonifier aux yeux de l’opinion commune ? A quoi se résumerait le « métier d’intellectuel » chez nous ?
A quelle réponse devrais-je me fier si on me demandait de dire succinctement ce que les intellectuels de mon continent- y compris de mon pays- ont initié comme début de solutions à l’inflation des prix des denrées alimentaires de première nécessité ? A la présidence à vie comme Laurent Gbagbo veuille le montrer ? A l’opacité dans la gestion des deniers publics puisque l’Afrique est honorée à en être le porte –étendard de ce vice démodé ?
Mieux, au problème de solutions à y apporter, s’ajoute mon incrédulité profonde : je ne sais qui croire et en qui avoir foi. Cet « athéisme politique » pour paraphraser l’autre, me ronge l’esprit d’autant plus que j’y suis conforté dans l’expérience et la vie de tous les jours. Bon nombre de chefs d’Etat dévient de la trajectoire indiquée par leurs programmes politiques pour sombrer à jamais dans l’entêtement et l’inconséquence une fois aux affaires. Ils ne s’en remettront qu’extirpés du pouvoir afin de répondre à l’injonction de la justice, aux interrogations musclées de patriotes frustrés à la lumière de la déstabilisation de Tandja au Niger. Et curieusement, les candidats populaires- je veux dire ceux de la rue- excellent le plus en illustrant ce propos ».
Vous rappelez- vous le lynchage médiatique autour de l’érection de la « basilique notre dame de la paix » de Houphouët Boigny qui disait la mettre sur pied pour honorer le Vatican dont une bonne partie des fidèles n’étaient pas convaincus de la valeur de la bâtisse à ce moment de torpeur de l’économie ivoirienne ? « Le bélier ivoirien » se défendra en disant qu’elle a été financée par sa sœur et lui-même. Mais là n’est pas le problème : il s’agit que nos dirigeants sachent bien gérer. Car ériger ce monument à ce moment difficile de la marche de la Cote d’Ivoire est la meilleure manière de prouver qu’il ne savait pas échelonner l’ordre des priorités ? Ce seul couac dans sa politique le disqualifiait déjà des hauteurs républicaines ?
Vous rappelez-vous la création du « monument de la renaissance africaine » ? Sûrement, oui car il ne sera pas si facilement enfoui dans nos mémoires et dans les vôtres ! Si l’Afrique doit renaitre, elle n’a pas besoin de le matérialiser sur une statue de plusieurs dizaines de milliards de Francs CFA. Elle n’a pas besoin de tout ce gouffre financier qui peut servir à d’autres fins encore plus essentielles. Chaque jour que Dieu fait, des hommes et des femmes se réveillent sous ce Soleil d’Afrique, et malgré la maigreur de leurs moyens et leurs capacités physiques, morales et intellectuelles, se tuent à réussir et à résister à la mort. Avec comme seules armes leur abnégation, leur courage, leur bravoure, leur impassibilité, leur dévouement, leur incorruptibilité, leur sens du devoir et du travail bien consciencieux, ils refusent la facilité et l’oisiveté. A mon avis, si on aide ces gens à réussir, si on jette un coup d’œil sur les populations défavorisées et accompagne celle plus ou moins favorisées, alors on participera à la « Renaissance africaine ». Car ces valeurs que certains s’évertuent à domestiquer encore, sont bien les nôtres : celle d’une Afrique intègre.